La plupart des gouvernements européens n’ont pas respecté la date butoir pour transposer la directive sur le salaire minimum en droit national. Certains d’entre eux vont même jusqu’à œuvrer activement contre les objectifs de la directive.
Plus de 20 millions de personnes devraient bénéficier d’une augmentation salariale si la directive était correctement implémentée, avec des salaires minimums qui tiennent compte du coût de la vie et davantage de travailleurs couverts par des salaires négociés collectivement.
Selon une nouvelle étude de l’Institut syndical européen (ETUI), le « double seuil » de décence– 60% du salaire médian et 50% du salaire moyen – prévu par la directive a déjà un impact positif sur la fixation du salaire minimum dans de nombreux pays.
Cependant, les informations communiquées par les affiliés de la Confédération européenne des syndicats (CES) dans le cadre de la campagne « Wage-Up » montrent que la plupart des pays de l’UE n’ont pas respecté la date butoir du 15 novembre pour la transposition de la directive. En ces temps où croît le mécontentement en raison de la baisse du revenu réel, l’application de cette législation est le premier test majeur pour la prochaine Commission.
Les syndicats nationaux invoquent le « manque de volonté politique » de certains gouvernements d’implémenter cette directive qui fait date. »
- Pays-Bas. « Aux Pays-Bas, la date butoir pour la transposition ne sera pas respectée. Pire encore, la législation proposée par le gouvernement pour la mise en œuvre de la directive ne répond pas aux exigences qui en découlent. La Commission européenne devrait immédiatement agir face à cette situation et faire pression sur le gouvernement néerlandais pour y remédier. » – FNV.
- France. « Selon nous, le principal problème est le manque de volonté politique de la part du gouvernement français de travailler avec les syndicats et les organisations patronales sur une transposition ambitieuse de la directive. Le gouvernement estime que le droit français y répond déjà et qu’il n’y rien d’important à y ajouter ou amender. » – CGT
- Pologne. « Il n’y a aucune chance d’y arriver d’ici à la fin de l’année. Du point de vue des syndicats, le problème est avant tout que, singulièrement, le projet de loi sur les conventions collectives n’inclut pas de modalités suffisamment ambitieuses à même de fondamentalement améliorer la couverture de la négociation collective. » – NSZZ Solidarnosc
Chose incroyable, des syndicats ont également donné des exemples de gouvernements nationaux prenant des mesures qui réduiront les salaires et la couverture de la négociation collective.
- Tchéquie. « Sans avoir consulté les partenaires sociaux, le gouvernement a introduit un amendement au code du travail qui abolit la notion de « salaires garantis » pour les travailleurs du secteur privé. Cela veut dire qu’à l’avenir, ces travailleurs seraient moins payés parce que le nouveau salaire minimum général serait inférieur au salaire minimum garanti actuel. » – CMKOS
- Luxembourg. « En l’absence de syndicats ayant une représentativité nationale, le ministre du travail tente d’affaiblir les objectifs de la directive en permettant à des délégués non-syndiqués de négocier des conventions collectives. Cela s’apparente en fait à une attaque ciblée du gouvernement luxembourgeois contre les syndicats dans le but évident de réduire leur influence. » – OGBL et LCBG
- Lettonie. « Le gouvernement essaie d’introduire le « droit de se retirer unilatéralement des conventions collectives et de supprimer le droit d’invoquer la convention collective comme facteur déterminant de la concurrence pour les marchés publics. Cela va clairement à l’encontre des objectifs de la directive sur le salaire minimum. » – LBAS
Réagissant à ces résultats, la Secrétaire confédérale de la CES Tea Jarc a déclaré :
« Les personnes qui, bien que travaillant dur jour après jour, ne pourront se permettre d’allumer le chauffage cet hiver ne comprendront pas pourquoi leur gouvernement n’a pas fait une priorité de la mise en œuvre de la directive sur le salaire minimum. »
« Cette directive a le potentiel de changer la donne si elle est correctement implémentée, non seulement en assurant que les conditions de rémunération de base prennent en compte le coût de la vie mais aussi qu’un plus grand nombre de personnes bénéficient vraiment de salaires équitables à travers la négociation collective. »
« C’est pourquoi il est choquant que tant de gouvernements ne respectent pas les promesses faites aux travailleurs il y a deux ans et que, honteusement, certains d’entre eux essaient même de remettre en cause la rémunération équitable et la négociation collective. »
« Les gouvernements nationaux doivent travailler avec les syndicats afin de pleinement tenir la promesse de la directive sur le salaire minimum. S’ils persistent à ne pas le faire, la Commission devrait imposer son application. »
« La crédibilité de la Commission auprès des travailleurs repose sur la question de savoir si les promesses faites ont été respectées et font une différence tangible dans leur vie quotidienne. »