Bruxelles, 14 -15 mars 2006
1.1 Renforcer la cohésion sociale, donner du « contenu » au modèle social européen, qui se traduit, notamment par des systèmes de protection sociale de qualité et de haut niveau et une lutte déterminée contre l'exclusion sociale, telles sont pour la CES les ambitions européennes, qui devraient trouver leur traduction, au niveau des Etats membres, dans le cadre de la Méthode ouverte de coordination rationalisée et réaffirmée lors du prochain Sommet de printemps.
1.2 En ce qui la concerne, la Commission, dans la perspective de la tenue de ce Sommet et qui devrait déboucher sur la prise de décisions concrètes dans le domaine des politiques sociales, a publié le 22 décembre 2005, une Communication intitulée [[http://europa.eu.int/comm/employment_social/social_inclusion/docs/com_2005_706_fr.pdf]] « Travailler ensemble, travailler mieux : un nouveau cadre pour la coordination ouverte des politiques de protection sociale et d'inclusion sociale dans l'Union européenne ».
1.3. Cette communication précise la proposition formulée lors du Conseil informel « Emploi » de Varèse, le 10 juillet 2003, visant à créer un cadre rationalisé des différents processus relatifs aux MOC Inclusion, Pensions et Soins de santé et de longue durée, qui deviennent ainsi la « Méthode Ouverte de Coordination appliquée à la Protection Sociale et à l'Inclusion Sociale » (MOC PSIS). L'un des objectifs affichés à cette rationalisation (streamlining) vise à favoriser et à améliorer les échanges qui se nouent entre les Etats membres, dans le cadre de la MOC.
1.4. Déjà, à l'époque, par lettre en date du 16 septembre 2003, la CES, en commun avec les autres partenaires sociaux européens, avait fait savoir, au Président du Comité de la Protection Sociale, qui les consultait, son accord de principe pour cette rationalisation, dans la mesure où celle-ci peut contribuer à mettre en œuvre des politiques mieux articulées et qui se renforcent mutuellement.
1.5 Dans le même temps, la CES et ses partenaires, insistaient sur le fait que la rationalisation devait également être menée de manière à ne pas perdre l'identité et la visibilité des processus existants.
1.6 Les partenaires sociaux avaient, à cette époque déjà, formulé, un certain nombre d'inquiétudes et en particulier leurs craintes :
- que le regroupement des différents processus remette en cause la dynamique qui sous-tendait chacun d'eux au niveau des Etats membres ;
- que la définition d'objectifs communs généraux ne puisse prendre suffisamment en compte les défis spécifiques posés aux niveaux de trois processus et concernant des populations et des acteurs différents ;
- que l'absence d'une définition claire du rôle des acteurs concernés, et en particulier des partenaires sociaux, n'améliore pas leur implication et la concertation, nécessaires à la mise en œuvre et à la réalisation des objectifs affichés.
2. Au regard des précisions apportées dans cette dernière communication concernant les propositions de la Commission en vue du Sommet de printemps, il apparaît pour la CES que ces craintes sont loin d'être levées, ce qui l'amène à formuler pour le Conseil quatre exigences stratégiques, qui lui semblent déterminantes pour la réussite de ce processus de rationalisation et pour rendre à la MOC toute sa pertinence, afin d'atteindre les objectifs sociaux fixés à Lisbonne en 2000. A savoir :
- renforcement du processus,
- ajout d'objectifs spécifiques pour chaque domaine,
- élaboration d'indicateurs quantitatifs et qualificatifs,
- meilleure implication des acteurs, en particulier syndicaux.
2.1. En effet, pour la CES, si la croissance et la compétitivité sont des éléments importants à développer, ils ne sont pas des fins en soi. Ce sont des moyens au service d'emplois en plus grand nombre et de meilleure qualité.
2.2 Mais la CES relève et dénonce une contradiction au niveau de l'Union européenne : d'un côté on développe des discours sur la justice sociale et la qualité des emplois, et de l'autre les responsables européens laissent se développer, au niveau des Etats membres, des politiques de précarisation de l'emploi, sources de pauvreté et d'exclusion sociale.
2.3 En ce qui la concerne, la CES entend se mobiliser contre de telles pratiques afin de garantir et améliorer le bien-être des citoyen(ne)s européen(ne)s et de développer la cohésion sociale.
3. C'est pourquoi, la CES fixe comme première exigence le renforcement du processus même de la MOC, dans le cadre de sa rationalisation.
3.1. Renforcer le processus de la MOC, n'est pas pour la CES se lancer dans une démarche procédurale, mais lui donner un réel contenu et pouvoir tirer le parti maximum de ce mode de coopération et de coordination européennes, dans des domaines de la protection sociale (santé, pensions) ou de la lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale.
3.2 C'est pourquoi, comme elle l'a déjà affirmé dans ses résolutions précédentes, la CES soutient une MOC qui ne saurait se réduire à un simple cadre pour une coopération étroite dans le domaine de la protection sociale, fondée sur l'échange d'expériences, l'apprentissage mutuel et l'étalonnage des performances en vue d'identifier les meilleures pratiques, même s'il y a toujours des enseignements à tirer de cet échange entre les Etats membres.
3.3. Car, pour la CES une telle démarche serait trop faible et insuffisamment opérante au regard des défis qui sont à relever, tant en ce qui concerne la lutte contre l'exclusion sociale, qu'en ce qui concerne le devenir et la qualité des systèmes de pensions ou de soins de santé et de longue durée.
3.4. La CES souhaite, en ces domaines l'adoption, au niveau européen d'objectifs forts en matière d'amélioration sociale, et d'un calendrier permettant de les atteindre, impliquant toutes les parties concernées, et en particulier les organisations syndicales, et un système d'évaluation.
3.5. Ceci implique également que les Plans stratégiques nationaux d'actions (les PANs) ne se résument pas à de simples rapports d'activité, mais soient de véritables programmes d'action, orientés sur la réalisation d'objectifs préétablis. Leur évaluation sur base d'indicateurs qualitatifs et quantitatifs par le Comité de la Protection Sociale et par la Commission doit permettre de fixer des orientations/recommandations. Pour la CES, il est essentiel que cette coordination mène à une convergence vers le haut, et dès lors une amélioration des politiques sociales.
3.6 En résumé, ce processus de « rationalisation » doit permettre le renforcement des différentes MOC existantes, en les ancrant mieux dans les politiques nationales, et rendre les objectifs sociaux plus visibles et importants dans le cadre de la Stratégie de Lisbonne.
4. Des objectifs transversaux, complétés par des objectifs spécifiques pour chaque domaine, une deuxième exigence.
4.1. La CES est d'accord à ce qu'il y ait un nombre limité d'objectifs transversaux.
4.2 Mais elle insiste également sur le fait que la rationalisation doit être menée de manière à ne pas perdre l'identité et la visibilité des processus existants, ce qui implique que ces objectifs généraux transversaux soient complétés par des objectifs plus précis déclinés et mis en oeuvre au niveau national en fonction des réalités territoriales
4.3 Et la CES s'interroge sur la pertinence qu'il y a aujourd'hui à changer les objectifs existants, notamment en matière d'inclusion sociale et de lutte contre la pauvreté, avant qu'une évaluation complète en ait été faite.
4.4 D'autre part, en rester à des objectifs généraux ne permet pas de définir des indicateurs suffisamment précis, permettant une évaluation pertinente de leur mise en œuvre. Ceci est vrai tant en ce qui concerne l'inclusion sociale, que les pensions et les soins de santé et de longue durée.
4.4.1. C'est la raison pour laquelle la CES se mobilise avec ses partenaires, dans le cadre de cette MOC rationalisée, pour la définition d'objectifs, à la fois précis et ambitieux dans le domaine des soins de santé et de longue durée.
5. Elaboration d'indicateurs à la fois quantitatifs et qualitatifs, troisième exigence.
5.1 La définition d'objectifs précis détermine la pertinence des indicateurs à mettre en place, autrement dit la capacité à pouvoir disposer d'instruments efficaces d'évaluation des progrès enregistrés.
5.2 La mise en place de tels indicateurs, associant les parties impliquées, sera
- un incitant pour l'ensemble des Etats membres à atteindre les objectifs fixés dans le cadre de la MOC Protection Sociale et Inclusion Sociale
- et permettra d'évaluer objectivement les résultats enregistrés nationalement
5.3 La rationalisation censée donner une impulsion forte aux Etats membres, à la Commission et aux autres institutions de l'Union, sera d'autant plus déterminante qu'elle sera associée à des processus d'évaluation à la fois qualitatifs et quantitatifs.
6 Enfin, une quatrième exigence : De meilleures modalités d'implication des parties intéressées et en particulier des organisations syndicales, tant au niveau national qu'européen
6.1. Pour la CES, la MOC rationalisée ne peut être bien enracinée et porter les fruits espérés que si elle associe tout au long de son élaboration, de sa mise en œuvre et de son évaluation, toutes les parties concernées.
6.2. Il est pour elle important, d'assurer la place des partenaires dans le processus. En effet, autant les organisations syndicales que les associations spécifiques connaissent les problèmes du terrain et leur expertise doit être mise à profit dans le développement de la stratégie.
6.3 Ceci suppose qu'au niveau national, comme au niveau européen, soient mises en place, les structures de concertation appropriées nécessaires, afin de rendre la politique européenne en matière de protection sociale et d'inclusion sociale plus fonctionnelle, visible et transparente..
7 Progresser dans la construction de l'Europe Sociale
7.1. Pour la CES, l'affichage d'une volonté politique déterminée en ces domaines et la mise en place de partenariats forts sont des éléments déterminants pour la crédibilité des politiques européennes, tant indispensable actuellement, et pour progresser sur la voie de la construction d'une véritable Europe sociale, qui redonne à l'ensemble des citoyen(ne) confiance en l'Europe.
7.2. Enfin, cet exercice de la rationalisation, que soutient la CES, doit renforcer cette « dimension sociale » de l'Union Européenne - faite de droits sociaux mieux garantis et d'une meilleure cohésion sociale - à laquelle aspirent les citoyennes et citoyens des Etats membres, mais également ceux des pays en voie d'adhésion ou candidats.