Bruxelles, 07-08/12/2011
{{ {Avant-propos
} }}
Le 26 juin 2011, la Commission a rendu publique la proposition intitulée « Un budget pour la stratégie Europe 2020 », définissant les nouvelles perspectives financières de l’UE pour la période allant de 2014 à 2020. Le 6 octobre, la Commission a publié ses propositions concernant le Règlement couvrant tous les instruments structurels de l’UE et le paquet législatif de la politique régionale, de la politique de l’emploi et de la politique sociale de l’UE pour 2014-2020.
Ces propositions ont fait l’objet d’un dialogue structuré avec la société civile et les parties prenantes (associations d’autorités locales, ONG, partenaires sociaux, citoyens, etc.). Cette procédure devrait aboutir à la fin de l’année. En janvier 2012, la Commission devrait publier le dernier paquet de propositions, qui sera soumis au Parlement européen, au Conseil, au Comité des régions et au Comité économique et social.
Au cours des derniers mois, la CES a examiné de façon approfondie les propositions de la Commission avec ses affiliés, au sein du Groupe de travail sur la cohésion économique et sociale et du Comité exécutif d’octobre, sur base de la dernière Résolution du Comité exécutif adoptée les 8 et 9 mars 2011.
Le Comité exécutif a élaboré une note de réflexion sur cette question les 19 et 20 octobre 2011, qui constitue un document de référence pour ce projet de résolution.
{{ {Le contexte économique
} }}
Pour procéder à une analyse adéquate des nouvelles perspectives financières européennes, on ne peut passer sous silence le contexte général de profonde crise économique qui a radicalement modifié les hypothèses sur lesquelles la Stratégie Europe 2020 a été basée.
Les objectifs et instruments contenus dans la Stratégie Europe 2020, qui sont fondamentalement positifs, doivent être mieux orientés et adaptés à la nouvelle situation. Cela devrait se faire dans le cadre d’un marché de l’emploi régulé et inclusif, offrant aux citoyens européens des possibilités en matière d’emplois stables et de qualité, adaptés aux compétences qu’ils ont acquises.
Les fonds structurels ne suffisent pas, à eux seuls, à faire face à la crise. L’Europe a besoin d’une gouvernance économique différente, basée sur les investissements, la solidarité et l’intégration sociale au lieu d’une austérité aveugle. Le budget de l’UE doit être réformé selon ces principes.
{{Position de la CES et appel à consultation
Le principe du partenariat et la consultation des partenaires sociaux}}
1. En plus du dialogue structuré avec la société civile élargie déjà lancé par la Commission, la CES demande à celle-ci une consultation officielle, réservée aux partenaires sociaux et plus importante que par le passé, sur l’ensemble des propositions récentes relatives au budget de l’UE et à la réglementation des fonds structurels, parce que le contexte extraordinaire de la crise économique requiert une participation des partenaires sociaux en bonne et due forme. Les partenaires sociaux ont en fait un haut niveau de représentativité entre employeurs et salariés et pourraient contribuer fortement à définir les objectifs et à obtenir des résultats pour les politiques de cohésion.
2. La CES estime que le principe du partenariat doit jouer un rôle clé, en assurant que les mesures liées aux Fonds structurels de l’UE fonctionnent correctement. Les règlements sur les Fonds structurels doivent clairement définir le principe de partenariat au lieu de faire simplement référence aux « règles et pratiques nationales actuelles », tout en définissant clairement le rôle de chaque partenaire aux plans national, régional et local.
3. Les partenaires sociaux doivent avoir accès à l’assistance technique afin d’assurer non seulement le renforcement de leurs capacités, mais aussi leur coordination et leur représentation dans les comités ad hoc et les procédures décisionnelles qui définissent et mettent en œuvre les programmes opérationnels à tous les niveaux.
4. Le mode actuel de consultation des partenaires sociaux conjointement avec les États membres au sein du Comité FSE pourrait constituer une bonne base de référence applicable à tous les fonds. Un Comité tripartite permanent (Commission européenne, États membres, partenaires sociaux) concernant l’ensemble des Fonds structurels doit être constitué, tout en maintenant le Comité FSE sous sa forme actuelle.
{{
}}Revenus, mesures fiscales et montant du budget
5. La CES est, en principe, favorable aux propositions de la Commission pour une taxe sur les transactions financières et une TVA européenne harmonisée. Cependant, nous sommes très préoccupés par le fait que la Commission propose d’utiliser les revenus de la TTF pour réduire les contributions des États membres plutôt que pour financer des investissements. Cette mesure irait à l’encontre des objectifs initiaux de la campagne de la CES appelant à une TTF. La TTF proposée par la Commission serait dirigée contre les spéculateurs financiers, mais ne produirait pas de ressources supplémentaires pour soutenir le développement durable et la croissance économique.
6. Il est possible que la TTF ne soit pas approuvée par le Conseil européen, ou que son champ d'application soit restreint. Dans ce cas, il serait très important de garantir que tout le budget de l’UE ne soit pas réduit.
7. En vertu de la proposition de la Commission, le montant total du budget de l’UE serait en tout cas réduit en dépit de l’introduction de la TTF et de l’augmentation du Fonds social européen. Dans le passé, la CES a demandé une augmentation du budget de l’UE et notre première priorité est, au moins, de le maintenir à son niveau actuel. La position de certains États membres, qui cherchent actuellement à geler le budget de l’UE et à réduire le montant des Fonds structurels, est préoccupante et inacceptable, en particulier dans le contexte économique actuel.
8. Il serait important, dans tout système de TVA européenne harmonisée, que soient maintenues les spécificités des États membres en matière de taux zéro et d’exemptions (par ex. l’exemption britannique sur les denrées alimentaires).
9. La CES soutient les propositions visant à introduire les euro-obligations et les emprunts obligataires pour des projets européens. Ces instruments seraient utiles non seulement pour s’attaquer aux dettes publiques mais aussi pour améliorer les investissements et la cohésion économique et sociale.
Priorités sociales, Fonds social européen et Fonds européen d’ajustement à la mondialisation
10. Le budget de l’UE doit être renforcé, en particulier pour ce qui concerne les chapitres soutenant la croissance économique, la cohésion sociale, l’éducation et la formation, l’innovation, l’économie verte et le développement durable, aux plans national et régional. Bien que cela doive rester un objectif clé, la politique de cohésion ne consiste pas seulement à réduire les disparités entre les régions. Elle doit aussi porter sur la promotion d’une société jouissant du plein emploi, de l’égalité des chances et de l’intégration sociale, renforçant ainsi d’une manière générale le modèle social européen. Il s’agit là des priorités sur lesquelles le nouveau budget de l’UE devrait être centré.
11. Le Fonds social européen (FSE) devrait être l’instrument de choix permettant de soutenir la mise en œuvre de la stratégie européenne pour l’emploi et devrait conserver ce rôle dans le cadre de la Stratégie Europe 2020. Dans le contexte exceptionnel actuel, le FSE doit aussi être axé sur la lutte contre la crise économique et protéger les travailleurs et les citoyens les plus défavorisés contre ses effets. Concrètement, il doit apporter un soutien aux personnes qui ont perdu leur emploi et doivent être intégrées dans le marché de l’emploi.
12. Le FSE devrait aussi devenir un instrument pour la promotion du travail décent. La mobilité devrait être soutenue en garantissant le concept de « mobilité équitable », en combattant le dumping social et en s’assurant que les normes de travail et les prescriptions légales soient toujours pleinement respectées. Afin d’éviter les inconvénients liés à la mobilité, les chercheurs d’emploi et les travailleurs mobiles doivent être complètement informés et conseillés.
13. Le FEDER (Fonds européen de développement régional) et le FSE doivent en particulier soutenir les défis liés aux changements structurels qui seront introduits par le processus de « verdissement de l’économie ». Le FSE doit soutenir les travailleurs dont les qualifications doivent être adaptées ou qui ont perdu leur emploi et doivent être réintégrés dans le marché du travail.
14. Selon la CES, le FSE n’est pas le bon instrument pour aborder l’aide alimentaire et la lutte contre la pauvreté, comme le propose la Commission. Ces objectifs pourraient plus facilement être atteints au travers du FEDER.
15. Afin de mieux mettre l’accent sur le chômage et de faciliter son utilisation, la CES estime que le Fonds européen d’ajustement à la mondialisation doit être inclus dans le FSE de façon à assurer la même cohérence entre les principes des deux fonds, surtout en matière de partenariat et de participation des syndicats. La CES n’est pas favorable à l’inclusion des agriculteurs sans emploi dans le domaine de compétence de ce fonds en attribuant l’essentiel du fonds, ou même sa gestion, au secteur agricole. La PAC et la « nouvelle réserve pour les crises » dans l’agriculture permettrait de soutenir l’industrie agricole avec plus d’efficacité.
{{ {Dimension territoriale et catégories de régions
} }}
16. Comme c’est déjà le cas dans la période de programmation actuelle, les régions bénéficieraient d’un soutien différencié, en fonction de leur niveau de développement économique. Cependant, ce niveau ne devrait pas être mesuré seulement sur la base du PIB par habitant. D’autres critères doivent aussi être pris en compte, y compris le taux de chômage, d’emploi et d’activité, le niveau de compétence, le taux de pauvreté, et le niveau de bien-être et d’intégration sociale ainsi que le taux de décrochage scolaire. De plus, le concept de « région » devrait être soigneusement évalué, et l’être à un niveau aussi local que possible : certaines régions pouvant, selon la plupart des critères, sembler relativement prospères (en PIB par habitant) alors qu’en réalité elles contiennent des poches d’extrême dénuement.
17. Concernant l’introduction d’une nouvelle catégorie de régions « en transition », avec un PIB moyen par habitant entre 75 % et 90 %, nous ne pouvons accepter cette mesure que si elle n’affecte pas le niveau de ressources allouées à la catégorie des régions les moins développées.
18. Les régions souffrant de handicaps géographiques ou démographiques spécifiques ont besoin d’un soutien spécifique. Cela est particulièrement le cas des régions situées aux frontières extérieures de l’UE, des régions les plus septentrionales, des régions insulaires ou des régions montagneuses.
19. L’Objectif 3 actuel de la politique de cohésion, qui fait référence à la coopération transfrontalière, transnationale et interrégionale, doit être renforcé. Les stratégies macro-régionales doivent également être soutenues. En outre, les régions frontalières et les Eurorégions, qui jouent un rôle de plus en plus important dans le contexte de la période de programmation actuelle, doivent être soutenues et doivent pouvoir compter sur la participation des partenaires sociaux dans les organes décisionnels et dans la mise en œuvre des objectifs fixés.
Procédures, coordination, performances
20. La CES partage l’opinion selon laquelle il faut mieux coordonner les fonds et améliorer l’évaluation, la performance et les résultats de leur utilisation. La CES soutient également toutes les mesures qui visent à limiter et à recentrer les priorités des Fonds structurels, à réduire les contraintes bureaucratiques et à accélérer les dépenses.
21. Des indicateurs de performance doivent donc être définis, mais il est également important de disposer de critères quantitatifs et qualitatifs. Cela inclut l’évaluation des résultats en termes d’efficacité des mesures prises, de qualité des emplois créés et d’inventaire des mesures positives mises en œuvre pour assurer l’intégration sociale.
22. La CES formule cependant de sérieuses réserves concernant l’approche liant l’octroi des fonds aux résultats, en particulier lorsque les « résultats » sont définis de manière étroite. Lorsqu’on examine la politique de l’emploi et, plus globalement, les politiques sociales, les aspects qualitatifs et à long terme revêtent une importance capitale. De plus, si l’octroi des fonds est lié à l’obtention de résultats immédiats, ceux qui sont les plus éloignés du marché de l’emploi – et donc les moins susceptibles d’obtenir des résultats « positifs » - risquent de n’avoir qu’un accès réduit ou de n’avoir pas accès à ces fonds.
{{ {Accords et conditions des États membres, règles de cofinancement
} }}
23. La CES souhaite examiner, avec d’autres partenaires sociaux, les nouveaux accords entre la Commission et les États membres sur les conditions relatives à l’utilisation des fonds européens. Les conditions devraient certainement mettre l’accent sur des objectifs sélectionnés et pratiques, mais ne pas pénaliser les États membres les moins développés, et être finalisées afin de soutenir la croissance économique et la croissance de l’emploi ainsi que la cohésion sociale.
24. Surtout, la CES rejette totalement la proposition de la Commission concernant l’application de sanctions financières et d’incitants liés aux Fonds structurels dans le cadre du Pacte de stabilité et de croissance. Ces sanctions pénaliseraient les États membres, régions et localités déjà faibles. De plus, la solidarité européenne, qui n'est pas encore suffisamment développée, serait menacée en raison du non-respect des engagements macroéconomiques. Il en résulterait un appauvrissement des peuples de l’Union européenne, ce qui est contraire aux principes de base de la politique économique et sociale et de la politique de cohésion territoriale telle qu’elle est réaffirmée dans le Traité de Lisbonne.
25. Le problème de la faible utilisation des ressources de l’UE par les États membres doit également être traité, en analysant ses raisons réelles et en identifiant les outils et les incitants destinés à accroître les dépenses. Il serait utile d’adapter les règles en matière de dépenses à la crise économique et à la crise du chômage, en réduisant temporairement les obligations de cofinancement pour les pays les moins développés. La CES demande également un renforcement de la participation des partenaires sociaux au débat sur cette « flexibilité » de l’utilisation des Fonds structurels dans le contexte de crise.
26. Les financements européens de projets d’infrastructure, en ce compris les emprunts obligataires pour des projets, devraient être soumis aux mêmes règles que les fonds structurels pour éviter des bénéfices exceptionnels pour les entreprises privées et assurer que l’argent soit investi en vue de réaliser les objectifs sociaux, économiques et environnementaux. Lorsqu’une procédure de marché public est utilisée pour la réalisation de projets, l’adjudication ne devrait pas se faire sur base du « prix le plus bas » et devrait inclure des critères sociaux et environnementaux.
Position de la CES pour téléchargement
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