Déclaration de la CES avant la 1ere phase de consultation des partenaires sociaux sur le travail de plateformes numériques

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Déclaration de la CES avant la 1ere phase de consultation des partenaires sociaux sur le travail de plateformes numériques

Cette semaine, le mercredi 24 février 2021, la Commission Européenne va lancer la première phase de la consultation des partenaires sociaux pour l’amélioration des conditions de travail des travailleurs de plateformes numériques.

La Confédération Européenne des Syndicats et ses affiliés, représentant plus de 40 millions de travailleurs en Europe, ont de grandes attentes pour cette initiative bienvenue et nous y participerons avec toute notre détermination. Les prochaines semaines et mois seront une occasion pour les syndicats européens de se positionner pour une action européenne en la matière, et de nous interroger sur quels outils législatifs seront nécessaires afin de rencontrer nos objectifs, y compris le respect de l’autonomie des partenaires sociaux et la promotion de la négociation collective.

11 mois après le début des confinements dus à l’épidémie de Covid-19, les travailleurs actifs sur ces plateformes se voient toujours refusés l’accès à la majorité de leurs droits sociaux et collectifs. Les récentes décisions judiciaires et administratives (Espagne, Italie, Suisse, Belgique, France, Pays-Bas…) ont montré que les plateformes étaient toujours en infraction sur le respect des droits des travailleurs en reconnaissant encore et encore la classification erronée des travailleurs en (faux-) indépendants alors que la plateforme se comporte, à l’aide de son outil de management algorithmique, comme un employeur. Il est plus que temps de transformer ces avancées juridiques en transformations politiques.

Dans la phase à venir, la CES aura deux objectifs : 1. gagner des droits pour les travailleurs atypiques qu’ils travaillent online ou offline (y compris ceux des plateformes numériques) et de 2. rendre compatible la digitalisation de l’économie avec la relation d’emploi et le respect des droits fondamentaux des travailleurs. En effet, c’est un enjeu pour l’ensemble de monde du travail car l’outil managérial de l’algorithme atteint de plus en plus de secteurs d’activité. Le business model des entreprises de plateformes numériques ne peut plus s’apparenter à du dumping social généralisé et exacerbé par l’outil algorithmique, mais peut avoir un futur si nous lui faisons respecter les droits des travailleurs. Certaines plateformes comme Just Eat récemment, avec leur décision d’engager les travailleurs sous statut d’employés, nous montre qu’il est possible de combiner salariat et autonomie. Les centaines de milliers d’accord collectifs entre employeurs et syndicats à travers l’Europe montre depuis des décennies qu’il est possible, dans le dialogue social, d’équilibrer l’organisation du travail et les besoins des secteurs. Cela devrait également être la manière de progresser dans l’économie des plateformes.

De la situation actuelle où les plus vulnérables dans la relation (les travailleurs) sont forcés d’être indépendant sans bénéficier de l’autonomie de ce statut, nous devons aller vers une présomption de statut d’emploi et une inversion de la charge de la preuve. Les armées de juristes des plateformes travailleront sans aucun doute sans relâche pour prouver qu’un travailleur est indépendant si tel est réellement le cas.

Ces avancées ne seront pas possibles sans dissiper l’illusion que ces plateformes agissent comme intermédiaires. Elles sont des entreprises à qui nous devons faire respecter le droit, ainsi que les obligations de tout autre employeur, sinon le terrain de jeu n’est pas équitable. Il faudra ainsi relier ces entreprises de plateformes numériques à leur secteur d’activité et aux différentes dispositions et réglementations qui y existent et y ont été négocié par les partenaires sociaux.

Cette semaine, une des célèbres plateformes de livraison de repas à domicile et de transport individuel ou collectif a remis un livre blanc à la Commission Européenne pour continuer à ne pas appliquer les droits élémentaires des travailleurs et éviter toute régulation. La CES souhaite que cette plateforme, ainsi que les autres, respectent les réglementations plutôt que d’exercer un lobbying pour éviter toute responsabilité. Nous invitons ces entreprises à prendre leurs responsabilités et à venir à la table de négociation avec les syndicats plutôt que de perpétuer des pratiques maintes fois condamnées par les cours.

L’Europe ne peut pas laisser ses Etats-membres prendre des décisions en ordre dispersés sous le chantage peu souvent déguisé des grandes plateformes. C’est avec une action résolue qu’elle montrera que l’Europe sociale tant évoquée se traduit dans les faits pour tous les travailleurs. Si certaines grandes plateformes ne sont pas capables de respecter ces droits fondamentaux des travailleurs et baisser leur taux de profit, nous sommes convaincus que d’autres plateformes plus vertueuses les remplaceront car il y a un avenir en Europe pour une digitalisation à visage humain et avec les droits fondamentaux au poste de pilotage. Toute nouvelle régulation doit assurer à tout prix que les systèmes de négociation collective ne soient pas mis en danger.

Dans les prochaines semaines, la CES ensemble avec ses affiliés répondra à la première phase de la consultation des partenaires sociaux et enverra un message clair au législateur européen.